L'inaccessible étoile - Lire Patrick Modiano
Le cadre de la fiction, ou de l’autofiction, n’est pas seulement le lieu propice à l’écriture de soi, il est aussi l’espace choisi pour dire ce qui ne peut l’être d’aucune autre manière. Conscient de créer à partir de la dévastation - en écho à ce que Maurice Blanchot qualifiait d’écriture du désastre -, Modiano ancre la fiction dans une forme de responsabilité, sinon de dette, à l’égard du passé. Comme si chacun de ses livres ouvrait une nouvelle porte vers un monde disparu, le romancier fait que « nos yeux reçoivent la lumière d’étoiles mortes », donnant ainsi corps à l’incipit du Dernier des Justes d’André Schwarz-Bart.
Il n’est peut-être pas faux de considérer que, depuis 1968, Modiano écrit une longue variation autour de son premier roman, si l’on veut bien garder à l’esprit cette déclaration : « J’ai toujours l’impression que j’écris le même livre, tout en oubliant ce que j’ai écrit avant... »
Variation, le terme semble particulièrement juste pour cerner cette écriture sans cesse revisitée, enrichie ou épurée comme peut l’être une phrase musicale. Quelle est donc la place de l’étoile dans cette histoire ? Et celle encore de la fiction dans le processus mémoriel ? Ces questions, herméneutiques autant que philosophiques, sont ici brillamment examinées par Myriam Ruszniewski Dahan.
Myriam Ruszniewski Dahan est agrégée de lettres modernes et titulaire d’une thèse consacrée aux romanciers de la Shoah publiée en 1999. Ses recherches portent sur les répercussions stylistiques de cet événement à nul autre comparable, pour les écrivains soucieux de le transmettre.